Les gladiatrices, ou femmes gladiateurs, constituent un aspect méconnu de l’histoire de la Rome antique. Bien que leur présence dans les arènes fût rare, des sources historiques et archéologiques attestent de leur existence, offrant un aperçu des rôles que certaines femmes ont assumés dans une société dominée par les hommes. À Rome, les combats de gladiateurs étaient l’un des spectacles les plus populaires, organisés pour célébrer des événements publics, honorer les dieux, ou marquer des victoires militaires. Les gladiateurs pouvaient être des esclaves, des prisonniers de guerre ou des criminels, mais certains, appelés auctorati, s’engageaient volontairement dans cette vie de combats sanglants, attirés par la gloire, l’argent, ou l’aventure. Les femmes n’étaient pas censées participer à ces combats : leur place dans la société romaine était avant tout domestique. Pourtant, la réalité de l’arène romaine s’avère plus nuancée que le rôle traditionnel qui leur était attribué. Si tu veux savoir comment ces femmes sont arrivées dans l’arène, suis-moi, je te raconte l’histoire…
Statuette d’une gladiatrice victorieuse, Musée de Hambourg
Origines sociales des gladiatrices
Femmes libres ou esclaves ?
La question de savoir si les gladiatrices étaient principalement des volontaires ou des esclaves est complexe. Les sources indiquent que certaines femmes choisissaient volontairement de devenir gladiatrices, souvent en quête de gloire, de richesse ou pour défier les normes sociales de leur époque.
Par exemple, un décret sénatorial de l’an 11 apr. J.-C. interdit aux femmes nées libres de moins de 20 ans de participer aux jeux publics, ce qui suggère que des femmes libres, y compris de la haute société, pouvaient participer aux combats.
Il est également probable que des femmes esclaves ou issues des classes sociales inférieures aient été contraintes de combattre dans l’arène. Le décret que je viens de mentionner laisse en effet supposer que les femmes esclaves pouvaient encore être utilisées comme gladiatrices. Ainsi, tout comme pour les gladiateurs masculins, la composition sociale des gladiatrices était probablement hétérogène, incluant à la fois des volontaires et des esclaves.
Statut social des gladiatrices
Des femmes non respectables
Les femmes qui choisissaient de devenir gladiatrices provenaient généralement des classes sociales inférieures, bien que certaines femmes de rang élevé aient également participé à ces combats. Leurs motivations pouvaient inclure la recherche de la gloire, de l’indépendance financière ou le désir de défier les rôles traditionnels assignés aux femmes. Cependant, en embrassant cette carrière, elles renonçaient souvent à leur respectabilité sociale, étant assimilées aux « infâmes », une catégorie juridique regroupant ceux qui exerçaient des professions considérées comme déshonorantes, comme les prostitués.
Formation des gladiatrices
Entrainées comme les gladiateurs ?
Les informations concernant la formation des gladiatrices sont rares et principalement déduites par analogie avec celle de leurs homologues masculins. Les gladiateurs étaient généralement formés dans des écoles spécialisées appelées ludi, où ils suivaient un entraînement rigoureux sous la supervision de lanistae (entraîneurs). Cependant, il n’existe pas de preuves directes attestant de l’existence de ludi spécifiquement dédiés aux femmes. Il est donc probable que les gladiatrices aient reçu une formation similaire, soit au sein des mêmes ludi que les hommes, soit dans des structures distinctes, ou, pour les plus riches, des cours avec un entraineur particulier. L’entraînement comprenait des exercices physiques intensifs, l’apprentissage des techniques de combat et la maîtrise des différentes armes utilisées dans l’arène. Les gladiatrices, comme leurs homologues masculins, devaient développer force, agilité et endurance pour survivre aux combats.
Bas-relief représentant un combat de gladiatrices, Achillia et Amazonia, Halicarnasse
Les sources historiques et archéologiques sur les femmes
Une documentation limitée
Les mentions de gladiatrices dans les sources antiques sont limitées mais significatives. Une inscription découverte à Ostie Antica, datant du milieu du IIᵉ siècle apr. J.-C., fait référence à un magistrat local ayant financé des jeux incluant des femmes combattant avec l’épée, suggérant la participation de gladiatrices dans l’arène.
L’historien Cassius Dion rapporte qu’en 66 apr. J.-C., l’empereur Néron organisa des jeux où des femmes, aux côtés d’hommes, participèrent à des combats de gladiateurs pour impressionner le roi Tiridate Ier d’Arménie. Suétone, dans sa biographie de l’empereur Domitien (81-96 après J.-C.), mentionne les combats de gladiateurs impliquant des femmes. Il note que Domitien a organisé des combats où des femmes se sont affrontées, notamment lors de l’inauguration d’un amphithéâtre qu’il avait fait construire à Rome. Il les dépeint comme un ajout spectaculaire aux jeux, choquant pour l’époque, et comme une manière pour Domitien de séduire son public. Le poète romain Juvénal, mentionne dans ses Satires les femmes qui combattent dans les arènes comme une nouveauté scandaleuse. Il critique l’importance de l’image publique et l’extravagance des spectacles et utilise cet exemple pour stigmatiser la décadence de la société sous le règne des empereurs.
Sur le plan iconographique, un relief en marbre provenant d’Halicarnasse (actuelle Bodrum, Turquie), conservé au British Museum, représente deux combattantes nommées « Amazonia » et « Achillia » (voir image ci-dessus). Leurs noms évoquent respectivement les Amazones mythiques et le héros Achille, soulignant l’association de ces femmes avec des figures guerrières légendaires. Elles sont représentées avec un équipement similaire à celui des gladiateurs masculins, ce qui suggère une certaine égalité dans l’arène. En France, un relief trouvé à Nîmes dans le Musée des Antiques montre des femmes combattant dans l’arène. Bien que moins célèbre que le bas-relief d’Halicarnasse, il fournit une autre représentation visuelle du phénomène des gladiatrices dans l’Empire romain. Quelques inscriptions funéraires témoignent également de l’existence de ses femmes combattantes dans l’empire romain.


