– Le silence d’Eurydice –

Je suis une âme mouvante, une nymphe évanescente,

Jadis la femme d’Orphée, aujourd’hui une silhouette effacée.

Le sol infernal se dérobe sous mes pieds,

Je lutte, je résiste, pour continuer d’exister.

Je suis le fantôme des Enfers au destin silencieux,

L’ombre d’Orphée au talent prodigieux.

Mon corps s’évapore dans le Léthé tortueux,

Je suis les larmes de cet homme amoureux.

Je me noie de sommeil, enfermée par Hadès,

Étouffée par le silence de ma détresse.

Tel un spectre vaporeux dont les formes disparaissent,

Je plonge dans les ténèbres, engloutie par la tristesse.

Je hurle mais je reste sans voix,

Je cours mais je ne peux plus faire un pas.

Je t’attends Orphée mais tu n’es pas là,

Je me retourne mais je ne te vois pas.

Je suis seule, en compagnie de ton absence,

Condamnée à être le reflet de ta souffrance.

Tes complaintes résonnent avec flamboyance,

Tandis que ma destinée s’imprègne de silence.

C’est ton deuil que l’on chante dans la mythologie,

Non pas la jeunesse et le sort que l’on m’a pris.

Ton échec m’a coûté le retour à la vie,

Toi tu pleures, moi je dépéris.

J’étais la femme bien aimée d’Orphée,

Attendant patiemment qu’il vienne me chercher.

Je suis la voix silencieuse des oubliées,

Préférant les Enfers à une vie de domestiquée.

Je m’enivre désormais d’obscurs délices,

Je préfère être libre sous terre à une vie de sacrifices.

Je choisis la douceur chaotique des abysses.

Je suis la silencieuse Eurydice.

Image de présentation : Eurydice et Orphée par Anastasia Shevchenko (Room8Studio).